
Bien que cette planche ait été prévue depuis longtemps, dans le séquentiel et le story board d'Hot Space, une petite phrase fait son apparition en case 5. En dehors de l'anecdotique, elle est le fruit d'une réflexion liée à mon travail en dehors de mes activités d'auteur (parce qu'être auteur, c'est sympa, mais vu l'état actuel de l'édition, je peux vous garantir que ce n'est pas sur cette passion que j'arrive à tirer un revenu me permettant de payer mes impôts, et de remplir mon frigo (le dire dans cet ordre a son importance dans le cynisme)). Dans mon autre vie, je m'occupe de transmettre des savoirs à des élèves. Non, ce n'est pas un boulot de professeur : je ne suis pas assez qualifié pour prétendre à un titre d'enseignant, ou de professorat. Je suis ce qu'on appelle un "intervenant"; un individus qui dispose de suffisamment de "trucs" pour pouvoir les transmettre à des élèves dans l'enseignement supérieur post-bac. Il se trouve que régulièrement, je fais passer des concours pour que des élèves puissent , notamment, devenir des professionnels dans les métiers du jeu vidéo. Or, années après années, je constate une chute dramatique du niveau des élèves en matière de dessin lorsqu'ils sortent de terminale. Étant passé moi-même par un Bac "Arts et Lettres", j'ai, pendant longtemps, été interpellé par cette chute du "savoir-faire". C'est en regardant de près le programme des spécialités dites "Arts appliqués" que j'ai eu un élément de réponse. Les jeunes élèves, en France, ne sont plus formés à "faire". Ils sont formés à "dire". Je dois avouer qu'en matière de critique d'Art, ou de commentaire de l'image, nous avons droit à des gens très pointus. Cependant, ils n'ont jamais approché les académismes qui m'ont été enseignés dans mes études du second cycle. Certes, aujourd'hui, les élèves dessinent tout de même, mais tout le pan académique du dessin a été, pour ainsi dire, "flingué" dans les programmes pédagogiques. Et pour enfoncer encore plus l'élève aspirant à étudier les pratiques du dessin et les méthodes graphiques, tout ce qui ressemble à une MANAA, en France, est devenu "hors la loi". Nous sommes en train de produire des générations de jeunes gens, remplis de rêves, qui ne savent que dessiner des chaussettes avec des grands yeux pleins de strabismes, puisque très inspirés par la culture graphique Manga (notez que j'ai rien contre, mais il n'y a pas que le Manga en terme de référence ). Devant cette urgence, j'ai donc placé cette phrase, dans cette planche 54.